mercredi 16 octobre 2013

Témoignage d'un ancien addicte...

"Tout a débuté il y a 4 ans. Je me suis essayé au poker, sans conviction, car un ami gagnait ainsi pas mal d’argent. Puis j’ai commencé à bien connaître les règles et à jouer quelques cents (on joue en dollars sur les sites illégaux). Ensuite, tout est allé très vite : en quelques mois, je jouais 200 à 300 euros par jour, soit 3 à 4 fois mon salaire tous les mois. Mais ce n’était pas grave pour moi : dès que je gagnais, je me disais que je pouvais remporter bien plus si je jouais plus. C’est devenu une obsession, je ne rentrais chez moi que pour jouer. Même au bureau, je lançais l’application poker dès que j’avais 5 minutes, quand j’étais au téléphone, etc. Je ne mangeais presque plus, ne dormais quasiment plus… J’étais constamment fatigué.

J’ai encore franchi un cap supplémentaire il y a 2 ans, en cumulant poker et paris sportifs. Pourquoi ? Pour m’amuser, mais surtout par appât du gain… La perspective d’argent facile, toujours ! Il m’arrivait de perdre beaucoup, alors je ne pensais qu’à me refaire. Et dès que je gagnais (jusqu’à 6000 dollars parfois), je visais plus haut. Sauf qu’autour des plus grosses tables, il y a de meilleurs joueurs. Quand l’on s’en rend compte, c’est déjà trop tard, on a tout perdu. Mais ce n’est pas grave, on continue. Cet argent que l’on perd, il semble comme virtuel. Le premier crédit que j’ai fait pour renflouer mes comptes aussi m’a paru virtuel. C’était avant le second, celui qui était censé « éponger » le premier… Bref, j’ai « perdu les pédales » pendant deux ans. Je me suis coupé de mes amis, de ma famille. Quand on en vient à oublier l’anniversaire de sa mère parce qu’on joue, c’est que l’on touche le fond.

 Comment j’en suis sorti ? Grâce à des amis qui avaient vu une publicité pour Adictel et qui ont compris que j’étais devenu un joueur compulsif. Je me souviens qu’au début, je pensais qu’ils me taquinaient quand ils me disaient que j'avais un problème avec le jeu. J’ai mis du temps à comprendre qu’ils étaient sérieux. Mais j’ai suivi leurs conseils, j’ai fini par appeler Adictel : c’était pratique, je n’avais pas à affronter quelqu’un en face à face. C’est bête mais c’était important à l’époque, car je n’arrivais même plus à me regarder dans une glace. Là, un psy m’a expliqué que j’étais un joueur addict, qu’il me fallait consulter. Il m’a proposé également de m’interdire l’accès à tous les sites de jeux, à tous les casinos. J'ai dit oui. Et en un clic, il l’a fait.

C’était en mars dernier. Depuis, tout est verrouillé, je ne peux plus jouer. Je le sais, j’ai tenté de me réinscrire. Parce que bien entendu, c’est dur. J’ai souvent envie de jouer et j’ai dû me défaire de tout ce qui me rappelait le jeu. Je vois un psy tous les samedis matins pour comprendre comment j’en suis arrivé là. Car si j’ai toujours été un peu joueur, jamais je n’aurais cru devenir à ce point dépendant. Le psy m’aide mais je pense que si je n’avais pas été interdit de jeux, je n’aurais pas pu arrêter tout seul. Jouer m’était devenu simplement indispensable. 

 Aujourd’hui, je me reconstruis. Comme j’ai perdu énormément d’argent, je travaille tous les jours pour rembourser mes dettes. Et je m’efforce de reconquérir les proches que j’ai perdus au cours des deux dernières années. Pour l’instant, je n’ai pas vraiment d’avenir, ça viendra dans quelques années, quand j’aurai réparé mes erreurs. Mais une chose est sûre : si on ne m’avait pas aidé, je n’aurais plus rien aujourd’hui."

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